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Valets des livres
17 octobre 2020

La tourterelle chante à l'aube, de Marie-Léontine Tsibinda

Le dernier livre de Marie-Léontine Tsibinda offre une découverte complète de son œuvre poétique. Il traduit son regard sur le monde, sur son pays. Il raconte les souvenirs de sa terre natale. Il dit aussi les blessures de l’Histoire. Ce livre est également comme un hommage aux figures littéraires porteuses de lumière.

 

ENTRETIEN 

 

Comment vous est venue l’idée de faire paraître « La Tourterelle chante à l’aube », qui met à disposition du lecteur votre poésie complète ?

Pour être tout à fait honnête, l'idée vient du poète Bilombo-Samba. Ressaisir tous les textes des premiers recueils fut un exercice titanesque. En fin de compte, je suis dans la joie car sept textes du recueil publié sous le titre de "La tourterelle chante à l'aube", aux Éditions Langlois Cécile, à Paris, en janvier 2019, ont été chantés par l'Ensemble Zellig sous la direction du musicien Bertrand Plé, les 2, 3, 9 et 10 novembre de la même année, à la Comédie Nation à Paris.

 

Vous citez de nombreuses fois votre terre natale, vous dites par exemple, page 15 : « Mayombe est ma première écriture/Pour ouvrir consonnes et voyelles ». La poésie est-elle un moyen pour vous de garder le lien avec votre pays natal, surtout depuis que vous vivez en exil au Canada ?

Ce pays natal qui toujours en moi demeure, me fait comprendre enfin toute la nostalgie d’Alphonse de Lamartine quand il chantait « Milly ou la terre natale », où les gens attendaient une eau limpide, même si elle était rare.

 

COUV La Tourterelle de TSIBINDA 001

 

Vous abordez plusieurs thématiques dans ce livre, des thématiques qui traduisent votre observation du monde comme il va. Dans le poème « liberté », vous citez plusieurs villes représentatives de la lutte pour la liberté : Soweto, Harlem, Mayotte, Johannesburg, Luanda. Pensez-vous que ces luttes sont révolues ou dépassées aujourd’hui ?

Je peux ajouter la Lybie, le Venezuela, le Yemen, la RDC, l'Irak, la Syrie... La liste s'allonge inexorablement. Des millions d'enfants demeurent sans avenir. Les conflits s'éternisent. Le monde vit, serré de détresse, de sang et de feu. Liberté, que de sang en ton nom !

 

Vous évoquez, dans le poème « Résister-Exister » la situation de l’homme noir dans le monde, mais aussi la position du Noir vis-à-vis du Noir. Etes-vous de ceux qui estiment que le pire ennemi de l’homme noir, c’est le Noir lui-même ?

Je l'ai sans doute pensé, écrit, mais les voyages me prouvent le contraire : la race humaine est la même dans le monde. L'homme aura toujours pour ennemi les gens de sa maison et cette exclusivité n'est pas réservée spécifiquement à l'homme Noir. L'homme Noir fait peur car malgré les mauvais traitements à lui infligés (esclavage, ébola, sida, guerre, exploitation... ), il tient debout, intrépide dans un monde civilisé et cruellement imparfait.

 

Photo TSIBINDA

(Marie-Léontine Tsibinda)

 

Vous êtes très sensible au devenir de l’Afrique. Vous dites page 165 : « On traîne l’Afrique/dans la boue/dans le sang ». Aujourd’hui encore, nombreux estiment que tout ce qui touche aux Noirs, à l’Afrique, à son histoire, est moins grave que ce qui a pu arriver aux autres populations. L'écrivaine Christine Angot par exemple distingue la traite et l'esclavage d'un drame comme la shoah (propos tenus sur les plateaux de l'émission "On n'est pas couchés"). Qu'en pensez-vous ?   

L'ignorance tue. Les inepties de ce genre nous font comprendre que l'intelligence de l'homme est limitée malgré ses diplômes : c'est l'intelligence divine qui éclaire. Les Juifs sont partout dans le monde libres de tous les mauvais traitements subis et tournés vers le futur. Le Noir ne sera pas éliminé par la seule volonté des méchants. Atteint, oui, éteint, jamais !

 

Votre livre consacre plusieurs pages au Congo, votre pays natal. Vous souhaitez par exemple « Que finissent les saisons des larmes de sang » ; « Que le Congo s’aime ». Quel regard portez-vous sur votre pays aujourd’hui ? Etes-vous prête à retourner y vivre ?

Dieu, qui a créé le Congo, ne l'a pas créé uniquement pour des calamités, des cataclysmes et des tragédies. Rien de nouveau sous le soleil, seulement un temps pour toutes choses. Un temps pour l'indicible, l'innommable, le tragique. Viendra un temps pour le bon, l'agréable et le parfait. L'exil ne durera pas, Dieu fidèle et juste veille et je me confie en lui.

 

Propos recueillis par Liss Kihindou.

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