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Valets des livres
7 février 2022

Ténèbres à midi, de Théo Ananissoh

Ténèbres à midi. Voici une photographie de l’Afrique. Une photographie qui montre une double face. Il y a la misère flagrante, les conditions de vie extrêmement révoltantes qui vous invitent à souscrire tout de suite à l’équation Afrique = pauvreté. Puis il y a le luxe tapageur, celui qui remet en cause la pauvreté intrinsèque de l’Afrique. Non, l’Afrique n’est pas pauvre.  Les populations sont maintenues exprès dans l’insalubrité et l’absence du minimum vital. Une manière de briser leur humanité, de les maintenir en quelque sorte dans un état de servitude. Ainsi, les habitants sont désarmés, pas simplement matériellement, mais aussi moralement, psychologiquement, intellectuellement. Ils ne constituent pas une menace pour le système.

 

COUV Ténèbres à midi

 

Il suffirait que ceux entre les mains de qui reposent les deniers du pays manifestent un tout petit peu de bonne volonté pour fournir à la population ce minimum grâce auquel elle se sentirait digne. Mais voilà, avec la dignité et l’orgueil personnel retrouvé, les habitants deviennent exigeants et difficiles à contrôler. Il est plus flatteur pour elle, pense la classe dirigeante, de voir croupir leurs compatriotes, de les voir ramper devant elle. Peu importe que le pays offre un visage aussi révoltant, les classes politiques africaines se contentent de leurs quartiers résidentiels, elles ne semblent pas tenir compte du fait que c’est dégradant même pour elles, pour leur image de dirigeants, de savoir que les habitants du pays qu'ils dirigent vivent dans des conditions dégradantes.

Mais quand aux commandes du pays se trouvent des personnes qui tirent leur fierté, non des actions qu’ils entreprennent pour une population plus digne, plus instruite, mais du pouvoir de disposer de toutes les femmes qui les intéressent, surtout celles de leurs collègues, alors on continue à patauger dans la médiocrité et à être la risée des observateurs étrangers, qui eux également ne se préoccupent que de tirer leur épingle du jeu. L’Afrique, hier comme aujourd’hui, est un gâteau que certains se réservent le droit de déguster. Ceux qui sont susceptibles de remettre en cause le système sont mis hors d’état d’agir. Les compromettre ou les éliminer. « L’humiliation ou la mort ».

Il est facile de porter un jugement de l’extérieur. On ignore les réalités vécues par ceux qui vivent sur place, y compris au cœur du système. On se croit en plein jour, en vérité on avance dans une nuit totale. « Ténèbres à midi ». 

 

Théo Ananissoh, Ténèbres à midi, Editions Gallimard, collection Continents noirs, 2010, 140 pages. 

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